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Quel égoïste ce gène!

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Adrien
Oskar
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Message  Oskar Jeu 1 Nov - 2:19

Bonjour amis écologues.

Pourriez-vous nous donner votre point de vue sur la théorie du gène égoïste de Richard Dawkins.

Ces travaux sont présentés comme explication des théories de l'Evo-Devo alors qu'il s'oppose clairement à Stephen Jay Gould sur l'application de ces concepts.
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Message  Adrien Jeu 1 Nov - 11:07

Pour ma part (et celle d'Elise, je le sais), la théorie du gène égoïste est plus qu'interressante. C'est la théorie la meilleur pour expliquer les comportements sociaux de type altruiste (ainsi que nombre d'autres si l'on suit ses présupposés).

En réalité, cette théorie ne va pas à l'encontre des concepts de Gould mais les complètent. D'ailleurs Gould a toujours eu très peu de concept sur ce sujet, mais s'axait plus sur les problèmes liés au contraintes morphologiques, principe de corrélation et sur les hétérochronies. Il n'a jamais énoncé clairement (du moins à ma connaissance) le concept de sa théorie de groupe qui lui tenait tant à coeur.
Gould et Dawkins ont toujours été deux rivaux sur le plan des concepts. Mais sur ce sujet là, je donne le point à Richard Dawkins ! Razz

Je vais l'expliquer rapidement pour ceux qui ne connaissent pas la théorie. Le conflit entre le "tout génétique" et le "tout environement" sur ce qui est de l'évolution des individus, dans les années 80, devrait être parfaitement réglé par ce que Dawkins propose. Il s'interresse pour, savoir qui est le l'unité de selection (gène ou individu), à répondre à deux questions :
Quelle est l'entité séléctionné au cours du temps ?
Qui subit la pression de selection ?
De là découle le concept de Nacker : "les organismes sont les marionnettes des gènes" et l'on ne peut s'interresser à l'évolution en oubliant l'un de ces deux protagonnistes.
Son concept suit celui de selection de Parentèle d'Hamilton et la notion de "replicateur/interacteur" d'Hull.

Si ce sujet vous interresse je vous conseille grandement deux livres de cet auteur :
Le gène égoïste et L'horloger aveugle
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Message  Yves Lun 5 Nov - 10:58

Une question à l'intention d'Adrien: pourrais-tu expliquer ce qu'est la théorie des groupes de Stephen Jay Gould, et dire en quoi elle n'est plus valable?
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Message  Adrien Lun 5 Nov - 21:17

Sans problème mon cher Yves,

je vais essayer d'être clair, précis et surtout ne pas dire de bétise (sinon réctifiez moi, vous autres)...

La théorie de selection de groupe se base non plus sur l'individu ou le gène mais sur le groupe. C'est-à-dire que l'unité selectionner serait le groupe ou l'espèce. De cette hypothèse, on arriive à l'abus de langage classique des journalistes ou documentaires animaliers : " pour le bien de l'espèce".
Mais il est très simple de démontrer que la selection ne peut pas avoir lieu sur le groupe mais seulement sur les individus. Et je vais essayer de vous le prouver avec deux exemples.

Tout d'abord, le "bien" du groupe n'est pas souvent un fait immédiat. Or la selection, elle, est immédiate et ne peut attendre que le "bien" arrive. Ce que je veux dire par là, c'est que l'évolution doit avoir un pouvoir selectif immédiat, sans quoi, s'il a un coût à court terme, dans un milieu où la selection naturelle est présente, même s'il pourrait avoir à plus long terme un bénéfice immense, le trait sera contre selectionné et n'aura pas le temps de montrer son "côté bénéfique"...

Mais le plus falgrant est le second. Souvent, les scientifiques ont utilisé ce concept (si l'on considère qu'il en est un) pour expliquer les comportements altruistes dans les populations, comme chez les insectes sociaux (hyménoptères, termites). C'est-à-dire, certains se "sacrifient" en ne se reproduisant pas pour favoriser le groupe.
Le problème essentiel est le suivant est qu'il suppose qu'il n'y ait ni mutation ni migration. En effet, si l'on imagine soit une mutation soit une migration provoquant l'apparition d'un individu égoïste dans cette population d'altruiste, alors celui-ci va se reproduire aux détriments du reste de la population et rapidement envahir sur le plan génétique la population jusqu'à exctinction des allèles "altruistes".

Dawkins explique que la théorie du gène égoïste pour un comportement altruiste est une meilleur explication que celle de selection de groupe. Pour cela, il fait appelle à une notion proposé en 1964 par Hamilton : la selection de parentèle ou "kin selection". Hamilton propose dans ce concept que les individus peuvent transmettre une copie de leurs gènes en favorisant la reproduction d'individus ayant une très forte proximité génétique, comme les frères et soeurs.
Ce qui est fondamentalement différent d'un véritable altruisme au sens de la selection de groupe, avec cette explication, le gène, lui a une stratégie égoïste et se transmet. C'est pourquoi Dawkins parle de la théorie du gène égoïste.
Il est amusant de remarquer par modélisation, par exemple, que chez des insectes sociaux de types haplodiploïdes (comme les fourmis ou les abeilles) c'est-à-dire dont les mâles naissent d'un ovule non fécondé et n'ont qu'une copie de chaque chromosome (N) et les femelles sont issues d'une fécondation et possède deux copies (2N), nous observons les proximités suivantes entre les génomes :
Les fils et la Reine = 100%
Les fils et les pères = 0%
Les Filles et la Reine = 50% comme pour les pères
Les filles et les ouvrières = 75%
La théorie voudrait donc que la Reine favorise les mâles pour que ses gènes soient plus représentés, alors que les ouvrières ont tout interêt à favoriser les filles.
Et bien voici les observations faites :
la Reine pond 75% de mâles et 25% de femelles, mais les ouvrières tuent une partie des fils qu'elles donnent à manger aux filles, si bien que le Sex-Ratio final est de 4% de mâles, pour 96% de femelles...
Après cela, je vous laisse réfléchir quant à un comportement altruiste ou égoïste des gènes !! Razz

j'espère que j'ai été assez clair, même si c'est pas toujours facile par écrit

Voici quelques reférences si vous voulez en savoir encore plus :
- Hamilton, W.D. (1964). The genetical evolution of social behaviour I and II. — Journal of Theoretical Biology 7: 1-16 and 17-52
- Le Gène Egoïste de Richard Dawkins
- G. C. WILLIAMS, Adaptation and Natural Selection, Princeton University Press, Princeton, 1966

un site interressant :
http://formes-symboliques.org/article.php3?id_article=167
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Message  azerty Sam 22 Déc - 16:42

l'un est paléonthologue et plutôt partisant sur saltatisme, l'autre est généticien et donc plutôt partisan du gradualisme. vers la fin de carrière de gould, ce n'est plus contradictoire (notamment avec les connaissances sur la dérive génétique et son rôle dans l'effet fondateur, ou encore grâce aux macromutations (ex: Ubithorax chez la drosophile)) car il rétablit les 2 points de vue (je crois que c'est lui, mais pas sûr) avec la théorie des équilibres ponctués.
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Message  Adrien Sam 22 Déc - 19:04

La théorie des equilibres ponctuées est bien de Gould, et s'il est vrai qu'elle rejoint les idées saltationistes et gradualistes...

Mais le problème qui a opposé Dawkins et Gould a tout point du vu et jusqu'au bout, c'est a savoir sur qui agissait la pression de selection. Pour Dawkins, le gène est l'entité qui, couplé à l'individu, subit la selection. Alors que Gould s'entêtera a ne vouloir que la selection de groupe... à mon goût, une erreur de sa part, mais des travaux tentent aujourd'hui de prouver que la selection de groupe pourrait agir au-delà de la selection de parentèle... affaire a suivre !
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Message  Elise Dim 23 Déc - 0:57

Voici quelques argument qui servent souvent de base à la critique de la sélection sur les gènes :

•Dépendance des organes (cellules, organes…) pour se reproduire, les gènes ne peuvent se multiplier de façon efficace que si les individus qui les portent se reproduisent eux-mêmes -> la sélection n’aurait de prise que sur la survie et la reproduction des individus… Elle n’a de prises que sur le phénotype !

•Génétique : l’autonomie des gènes est de plus en plus mnimisée, en effet il y a énormément d’interactions dans le génome et de régulations, de contrôle de gènes par d’autres etc.

•Souvent il n’y a pas de conflit d’intérêt entre les individus et ses constituants, sauf :dans le cas de la ségrégation d’allèles lors de la méïose (un des allèles est systématiquement transmis à plus de 50% des gamètes) et les « chromosomes égoïstes » : On appelle aussi ces chromosomes « parasites absolus ».
Ex : cas des hyménoptères. Certains mâles sont dotés d’un chromosome surnuméraire perturbant le déterminisme su sexe à son grand avantage : en effet il code pour un facteur qui détruit les chromosomes paternels (sauf lui-même) dans le zygote, donc le génome maternel est conservé et le paternel est réduit à 1 chromosome ! Le zygote rendu haploïde devient par ce fait un mâle ! Il n’y a aucun bébéfice pour les organismes qui le portent. (au passage ce gêne ne peut pas envahir toute la pop car sinon il n’y aurait plus de femelles : voici un bon exemple de fréquence-dépendance.

L’unité de sélection serait donc plutôt l’individu dans son ensemble
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Message  Julien Mar 25 Déc - 23:47

Pour ma part je ne vois pas vraiment de critiques qui tiennent vraiment le coup en face de la sélection sur les gènes.

Bien entendu, nous sommes tous d’accord pour dire que la sélection agit directement sur les organismes ; ce sont eux qui font face, de manière directe, aux conditions environnementales. Cependant, ce qui est transmis (donc ce qui évolue)est l’information génétique, et non les traits phénotypiques en eux-mêmes. D’ailleurs, le terme de reproduction utilisé pour décrire une partie du cycle de vie des organismes est inapproprié et trompeur. Les individus ne se reproduisent pas, même dans le cas d’une reproduction clonale. La seule entité capable de se recopier est l’information génétique.

Je n’utilise volontairement pas le terme « gène » car il est ambigu (dans le cadre de ce débat!), on pense toute suite à une région du génome codante, pourvue d’un promoteur et d’autres caractéristiques qui sont bien étudiées par la génomique fonctionnelle. L’information génétique englobe toute séquence nucléique, codante ou non, dont la longueur n’a pas de limite et dont les copies peuvent être partagées par des individus différents.

Il est ainsi très pratique de distinguer l’interacteur (l’organisme) et le réplicateur (l’information génétique). Le titre du livre de Pierre Henri-Gouyon, « les avatars du gène » est très évocateur à ce sujet. Les organismes ne sont que des représentations imparfaites de l’information génétique qu’il porte (rien de péjoratif dans tous ça, la nature est amoral). L’information génétique à la propriété de se répliquer (ou se reproduire, ici c’est approprié !) à l’identique par des procédés plus ou moins indirects. Des expériences montrent qu’avec molécules adéquates, des brins d’ARN libres dans une solution peuvent se répliquer et rentrer en compétition lorsque les ressources sont limitées. Il semble que l’évolution est menée les réplicateurs à développer des moyens toujours plus sophistiqués pour se propager tel que les cellules et les organismes.

Les organismes sont donc soumis aux pressions de l’environnement mais ce qui est réellement sélectionné (ce qui se perpétue) sont les réplicateurs.

La notion d’individu devient elle-même ambigue dès lors qu’on s’intéresse aux relations entre des endosymbiotes transmis verticalement et leur hôte (wolbachia, mitochondries…). La sélection agit sur l’entité constituée du génome de l’hôte et de celui de son symbiote car les 2 informations génétiques sont transmises en même temps par les mêmes voies.

La portée explicative de la vision individu-centrée (au même titre que la vision centrée sur le groupe) rencontre des obstacles conceptuels qui sont absents avec la sélection sur l’information génétique.
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