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15 Décembre - L'évolution à vue d'oeil

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Message  Julien Lun 15 Déc - 2:10

L'évolution biologique n'est plus une théorie mais un fait avéré. Voici un bel exemple qui devrait faire réfléchir les derniers fixistes qui pensent encore que les organismes vivants sont immuables.

L'histoire commence en 1971 quand des chercheurs qui étudiaient différentes espèces de lézards vivant sur des îles, tentent une expérience saugrenue. Ils décident de prélever 5 couples de lézards Podarcis sicula de la petite île yougoslave de Pod Kopiste en mer Adriatique, pour les introduire sur Pod Mrcaru, sa voisine encore plus petite où vit une autre espèce Podarcis melisellensis. Leur but était d'observer la compétition entre les 2 espèces mais les conflits interyougoslaves interdisent alors le suivi de l'expérience.

C'est en 2004, après 36 ans d'absence qu'une nouvelle équipe scientifique retoure sur Pod Mrcaru. Et là stupéfaction : non seulement la colonie d'intrus a évincé les occupants, mais elle compte plus d'un millier d'individus, chiffre inattendu sur une si petite île.

Mieux, les reptiles capturés ne ressemblent plus à leurs ancêtres restés sur Pod Kopiste : ils sont devenus plus grands, avec des membres proportionnellement plus courts, donc une vitesse de course moindre. Leur tête, plus puissante, est plus large et plus longue. Les analyses génétiques ont montré que les lézards de Pod Mrcaru étaient génétiquement identiques à la population source.

Mais alors pourquoi les exilés
ont-ils tant changé ? Quelques lavages d'estomac vont fournir la réponse : les
lézards qui étaient à 90 % insectivores sur leur île d'origine, ont intégré à
leur régime des plantes comestibles que Pod Mrcaru leur procure toute l'année. Les lézards seraient devenus plus grand car disposant d'une nourriture plus abondante, moins bon sprinteurs car chasseurs moins réguliers et se seraient dotés de mâchoires plus puissantes leur aidant à attaquer les plantes fibreuses.

Des modifications plus impressionnantes se situent au niveau de l'appareil digestif : ce dernier s'est modifié par l'apparition de muscles entre l'intestin grêle et le gros intestin créant des chambres de fermentation. De plus, les intestins ont été colonisés par des vers nématodes qui sont des parasites connus des lézards. Sauf que cette fois la relation a viré au mutualisme puisque les nématodes permettraient aux lézards de digérer la cellulose des matières végétales.

Et tout ça en quelques 36 générations soit une échelle de temps écologique visible par l'Homme. De quoi ravir Stephen Jay Gould, illustre défenseur de la théorie des équilibres ponctués, théorie selon laquelle l'évolution se fait par à-coups fulgurants entre 2 phases de stabilité.

Voilà, pas besoin de fossiles pour montrer aux créationnistes que les espèces changent au cours du temps !
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Message  YaZko Lun 15 Déc - 23:53

Article des plus intéressants. J'en profite, puisqu'il soulève deux trois questions qui me trottent dans la tête depuis mes années de bio au lycée :
Je maîtrise grossièrement la théorie, liant sélection naturelle et dérive génique. Mais il y a quelque chose, peut-être est-ce un simple abus de langage, qui me heurte chaque fois :

Si ici :
Les lézards seraient devenus plus grand car disposant d'une nourriture plus abondante, moins bon sprinteurs car chasseurs moins réguliers
Pas de problème ici, c'est même un troisième phénomène, une simple influence directe du milieu extérieur.

Mais là :
et se seraient dotés de mâchoires plus puissantes leur aidant à attaquer les plantes fibreuses.
Cet actif me gène. D'autant que ces machoires plus puissantes sont-elles un caractère héréditaire, ou simplement le produit, à chaque nouvelle génération, de mastiquation intensive développant la même machoire "de base" de leurs ancêtres? Car si c'est le premier cas, quel est le processus conduisant au développement de cette machoire, une mutation fortuite suivie d'une sélection étant à exclure sur une si courte période?

Et a forciori dans le cas de l'estomac : sous l'impulsion de quel phénomène l'apparition de muscles peut-elle se faire?

Merci d'avance et excusez le vocabulaire approximatif.

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Message  Julien Mer 17 Déc - 19:24

Salut Yazko, désolé d’avoir mis du temps à répondre mais c’est
le gros rush en ce moment. Ca a notamment été le rush pour rédiger ce post sur
ce cas d’évolution très rapide et il est vrai que j’aurai du formuler certaines
phrases autrement, de manière plus explicite et sans ambiguïté.





Alors je voudrais préciser 2 choses. D’une part, les traits
phénotypiques
(taille, poids, fécondité……) sont gouvernés par deux types de
facteurs : les effets des gènes que portent l’individu et les effets de l’environnement
dans lequel vit l’individu. Selon les traits, la composante génétique est la
plus importante (ex : nombre de pattes d’un lézards : peu sensible
aux variations de l’environnement à part en cas de nuage radioactif peut-être !
lol mais là c’est bien à nouveau l’effet des gènes puisque la radioactivité
provoque des mutations dans la séquence d’ADN), chez d'autres l'environnement va être le plus déterminant, avec tous les cas intermédiaires possibles. Ainsi quand on observe que les
lézards sont devenus plus grands il peut s’être passé 2 choses, qui ne sont pas
mutuellement exclusives :


-
soit il y a eu adaptation des lézards à
leur nouvel environnement donc une évolution du bagage génétique sous l’influence
de pressions de sélection modifiées, si tant est qu’être plus grand soit un
avantage dans le nouvel environnement. La dérive génétique peut aussi produire
de l’évolution mais qui n’est pas adaptative puisque c’est un changement
aléatoire des fréquences alléliques entre les générations.


-
soit les effets des gènes sont restés
inchangés (pas de nouvelles mutations, pas de changements des fréquences
alléliques) mais ce serait alors un simple effet environnemental : plus de
ressources nutritives permettent aux lézards de se développer plus longtemps et
donc de devenir plus grands. Dans ce cas il suffirait de nourrir abondamment les
individus de l’île source pour obtenir des lézards aussi grands.





2ième point : une mastication intensive
produisant une modification de la mâchoire au fil des générations voudrait dire
que les caractères acquis pendant la vie seraient transmis à la descendance :
jusqu’à preuve du contraire, l’hérédité des caractères acquis définie par
Lamarck n’a jamais été démontrée (à part si on parle des phénomènes d’épigénétique
mais là c’est encore une autre discussion, tout aussi intéressante). Quoiqu’il
en soit, le seul processus connu pour que des caractères des parents soient
transmis à leur descendance est l’élaboration d’un code génétique. Seule l’information
inscrite dans les gènes passe d’une génération à l’autre. Maintenant pour qu’il
y ait une évolution adaptative, c'est-à-dire que la sélection naturelle puisse
agir, il faut que dans le pool de gènes portés par la population de lézards il
existent des variations génétiques. La sélection naturelle ne peut « opérer
un tri » que si il y a des différences génétiques à la base. La
variabilité génétique est produite constamment par les mutations aléatoires
mais ce processus est en effet relativement lent. Sauf que si dans le pool
génétique de la population introduite il y avait déjà une grande diversité génétique,
un grand nombre de mutations formant des allèles différents et étant apparus
bien avant le changement d’île, la sélection a pu agir. Il existe un processus
plus rapide pour produire de la variabilité, qui est celui de la recombinaison
génétique qui à chaque épisode de formations des gamètes réarrange les gènes
portés par les chromosomes, créant ainsi de nouvelles combinaisons de gènes. Ce
phénomène est aussi de type aléatoire.


Donc quand je disais que les lézards « se seraient
dotés de mâchoires plus puissantes leur aidant à attaquer les plantes fibreuses »,
je parle bien d’allèles, déjà présent à la base ou produit par des mutations
(peu probable en effet sur 36 générations) qui auraient permis aux lézards qui les portent d’avoir une descendance plus
nombreuse. Ce qui aboutirait à l’augmentation des fréquences des allèles
favorables dans la population jusqu’à la fixation, c’est-à-dire la disparition
des allèles les moins avantageux, ceux produisant une mâchoire plus petite.



Pour les muscles s'étant développé autour des intestins, je pense que la sélection naturelle a permis la fixation d'allèles provoquant une hypertrophie des muscles déjà présents puisque l'intestin est normalement doté de muscles permettant les mouvements péristaltiques, guidant le contenu des intestins dans une seule direction. Je n'ai pas plus de détails à ce sujet.





Voilà, pas d’hérédité des caractères acquis ni de finalisme
(les lézards n’ont pas décidé de se doter de puissantes mâchoires pour mieux
exploiter les ressources), mais juste le hasard des mutations dans lequel la
sélection naturelle ne conservent que les plus avantageuses.
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Message  YaZko Sam 20 Déc - 19:10

Tout d'abord, excuse-moi à mon tour du temps mis pour répondre, et merci beaucoup pour tes précisions.

Donc ce qui m'avait échappé serait l'existence de diverses allèles, éventuellement récessives, comme dans le célèbre exemple du phalène du bouleau? Et donc les "nouvelles versions" du lézard devaient déjà se trouver sur la première île, mais en minorité?

Encore merci de tes explications.

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